samedi 14 février 2015

En musant... Catulle Mendès, Ballade de l'âme de Paul Verlaine

Tous, dès que la mort les déleste,
Les rois, les prélats en rochet,
Les gueux, frappent à l’Huis céleste !
Notre-Dame ouvre le guichet,
De la colombe à l’émouchet,
Chaque âme est une madeleine
Qui se souvient qu’elle péchait...
Et voici l’âme de Verlaine.
« Pleine de Grâce ! un propos leste
Souvent moussa dans mon pichet ;
Je vaux que me happe et me moleste
L’âpre Iblis aux dents de brochet ».
Mais Elle : « Rien ne te tachait !
Je sens comme la pure haleine
D’un grain d’encens dans un sachet ;
Et voici l’âme de Verlaine.
« Tes fautes, dont plus rien ne reste,
Furent la boue et le souchet
Où la violette modeste
De ton doux rêve se cachait.
Ce qui naguère t’empêchait
De t’épanouir dans la plaine
N’est plus qu’ombre, cendre, déchet !
Et voici l’âme de Verlaine ».
                                ENVOI
                À Notre-Seigneur Dieu.
Seigneur ! plus d’un banquier trichait
Voici pour Vous la marjolaine
Et le lys qui s’effarouchait,
Et voici l’âme de Verlaine.

Catulle Mendès, in Les Braises du cendrier